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Publié le : 7 avril 2025

Survol économique

Le premier trimestre de 2025 a été marqué par une incertitude économique accrue, exacerbée par les tensions géopolitiques et les politiques perturbatrices du retour de l’administration Trump. Les marchés demeurent particulièrement volatiles, les investisseurs étant confrontés à une évolution des risques politiques, notamment en matière d’échanges commerciaux, alors que les attentes concernant les taux d’intérêt ne cessent de fluctuer, que les divergences économiques régionales continuent de s’aggraver, et que l’intelligence artificielle a un impact direct sur la productivité, les dépenses d’investissement et les marchés du travail.

Aux États-Unis, les signaux économiques ont été mitigés en début de trimestre, puis se sont affaiblis au fil du temps. Alors que l’emploi et les dépenses de consommation ont fait preuve de résilience, les frictions commerciales accrues, la hausse des défauts de paiement sur les prêts hypothécaires et automobiles et le déclin de la confiance générale des consommateurs et investisseurs ont assombri les perspectives. Les entreprises ont ralenti leurs investissements, causant un déclin de la production, de l’emploi et des nouvelles commandes et provoquant le déclin de l’indice ISM manufacturier à 49,0 au moins de mars. L’indice PMI des services est également passé de 53,5 en février à 50,8, ce qui signale un ralentissement de croissance économique.

La Réserve fédérale a maintenu ses taux d’intérêt, adoptant une attitude prudente dans un contexte d’instabilité. Lors de sa dernière réunion, en mars, la Fed est revenue sur ses prévisions concernant le PIB qui sont passées de 2,1 % à 1,7 %, et a estimé un taux d’inflation de 2,8 %, soit bien au-delà du taux-cible de 2 %. Les pressions inflationnistes étaient évidentes dans l’indice des prix payés, qui a bondi de 54,9 en janvier à 69,4 en mars, son niveau le plus élevé en six mois, alimentant les craintes de stagflation.

Les données de l’indice PMI mondial ont mis en évidence des divergences régionales. L’indice PMI de l’industrie manufacturière chinoise a atteint 50,5 en mars – son deuxième mois consécutif d’expansion et le plus élevé depuis un an – soutenu par la demande en électronique et en machinerie. En revanche, l’économie de la zone euro est restée en repli, l’Allemagne et la France continuant d’enregistrer des baisses de production.

Face à ces vents contraires, l’UE semble se trouver à un point tournant sur le plan stratégique. En réponse aux menaces du président Trump de réduire les engagements des États-Unis en matière de défense, les États membres ont accepté d’accélérer les dépenses militaires. Ce pivot pourrait mener à des dépenses déficitaires importantes, en particulier de la part de l’Allemagne, qui dispose d’une plus grande flexibilité fiscale que nombre de ses pairs.

Au Canada, le départ du Premier ministre, Justin Trudeau, marque le début d’une nouvelle ère politique. Le Parti libéral a nommé Mark Carney, ancien gouverneur de la Banque centrale du Canada, à sa tête. Quel que soit le vainqueur des prochaines élections, il sera confronté à des défis de taille : relancer une économie léthargique, gérer les tensions commerciales avec les États-Unis et restaurer la crédibilité des politiques. Dans ces circonstances, l’OCDE a revu à la baisse ses prévisions de croissance pour le Canada en 2025, les ramenant de 2,0 % à 0,7 %. L’indice PMI des services s’est fait l’écho de cette faiblesse, chutant de 46,6 en février à 41,2 en mars, son plus bas niveau depuis la COVID, ce qui met en lumière les tensions intérieures croissantes.

Marchés des actions

Le trimestre a été marqué par un revirement brutal des marchés boursiers mondiaux. Après avoir enregistré un niveau record le 19 février 2025, l’indice des rendements globaux S&P 500 – qui était en hausse de près de 5 % à son apogée, depuis le début de l’année – a enregistré une correction de 4,2 % (CAD) en fin de trimestre. Ce repli, qui a marqué un tournant décisif en termes de confiance générale, n’est que le reflet de l’incertitude politique croissante, de l’affaiblissement des indicateurs techniques et de l’anxiété grandissante des investisseurs. La volatilité a bondi, principalement en raison des tensions commerciales et le risque de récession. En revanche, les actions européennes ont surpassé les marchés américains, et ce avec la plus grande marge d’écart, depuis les trente dernières années, affichant des gains à deux chiffres dans plusieurs pays, les investisseurs s’étant tournés vers des opportunités internationales aux valorisations plus attrayantes.

L’essentiel de la hausse en début d’’année fut alimenté par les valeurs technologiques à grande capitalisation, et principalement les « Sept magnifiques ». Ces titres, qui à eux-seuls avaient généré la majeure partie de la croissance de l’année précédente, ont également été à l’origine de son déclin. Les secteurs de la technologie (-12,8 %) et de la consommation discrétionnaire (-14 %) ont enregistré de fortes pertes (en USD). Les titres de croissance ont affiché des rendements nettement inférieurs aux titres de valeur, tandis que les actions à petite et moyenne capitalisation ont été encore plus malmenées, ce qui a accentué la faiblesse générale du marché.

Malgré le repli, les secteurs défensifs tels que les biens de consommation de base (+4,6 % USD) ont bénéficié du regain de popularité des titres à revenu fixe offrant davantage de stabilité, aux dépens des titres à croissance spéculative. Les actions versant des dividendes élevés ont également bien performé, les investisseurs privilégiant les sociétés offrant des rendements constants, des valorisations faibles et des caractéristiques fondamentales solides au niveau domestique.

Mis à part les États-Unis, les marchés des actions ont enregistré des résultats nettement supérieurs. Les actions canadiennes ont généré un rendement total de 1,5 % sur le trimestre, grâce à des gains importants dans les secteurs des matériaux (+19,9 %) et de l’or (+33,9 %), tandis que les secteurs de la technologie et de la santé sont restés à la traîne (tous les chiffres sont exprimés en CAD).

Les marchés développés internationaux, tels que mesurés par l’indice MSCI EAFE, ont gagné 7,1 % (CAD). Les marchés européens se sont particulièrement distingués, l’Allemagne et l’Espagne terminant en hausse de 10,5 % et 17,0 % (EUR), respectivement, soutenus par des valorisations attrayantes, des mesures de relance budgétaire et de solides rendements dans les domaines bancaires, de l’industrie et des produits de luxe.

Les marchés émergents ont également enregistré des gains, l’indice MSCI EM progressant de 3,1 % (CAD), bien que les performances aient été inégales. La Chine s’est distinguée, l’indice MSCI China progressant de 15,1 % (USD), le sentiment s’étant amélioré à la suite de réductions des taux d’intérêt et d’un soutien budgétaire ciblé.

Les marchés émergents ont également enregistré des gains, l’indice MSCI EM progressant de 3,1 % (CAD), bien que les performances aient été inégales. La Chine s’est distinguée, l’indice MSCI China progressant de 15,1 % (USD), le sentiment s’étant amélioré à la suite de réductions des taux d’intérêt et d’un soutien budgétaire ciblé.

En somme, le premier trimestre 2025 a marqué un point tournant dans le sentiment des marchés. La prédominance des titres de croissance a cédé la place aux valeurs dites « défensives », et la diversification internationale a porté ses fruits. Les investisseurs ont recherché la sécurité dans les dividendes, les matières premières et les marchés moins exposés aux technologies à forte valorisation.

Placements à revenu fixe

Le marché obligataire mondial a évolué dans un environnement complexe, marqué par le ralentissement des données économiques et l’aggravation des tensions géopolitiques, ce qui a alimenté la demande d’actifs de type « valeur refuge ». Les rendements du Trésor américain ont baissé, les rendements à 2 ans et à 10 ans perdant environ 35 points de base (pb) pour atteindre respectivement 3,89 % et 4,21 %, reflétant l’incertitude économique accrue et les attentes croissantes selon lesquelles la Réserve fédérale pourrait devoir assouplir sa politique dans le courant de l’année.

Au Canada, les inquiétudes persistantes concernant le ralentissement de la croissance intérieure et les pressions protectionnistes croissantes en provenance des États-Unis ont incité la Banque du Canada à réduire son taux d’intérêt au jour le jour de 25 points de base, à deux reprises au cours du trimestre. Cette mesure préventive visait à renforcer la confiance des entreprises et à soutenir les secteurs exposés aux échanges commerciaux. Les marchés obligataires canadiens ont réagi en conséquence, le rendement des obligations gouvernementales à 10 ans ayant baissé de 25 points de base pour terminer le trimestre à 2,97 %. Les rendements à court terme ont baissé de manière plus significative, résultant en un rendement de 2,0 % de l’indice FTSE des obligations de sociétés canadiennes au cours du trimestre.

Sur les marchés du crédit canadiens, malgré les inquiétudes persistantes concernant la croissance économique et la politique commerciale, les écarts de rendement des obligations d’entreprises se sont resserrés sur l’ensemble des échéances et des secteurs, reflétant la solidité des bilans, la stabilité des bénéfices et le faible nombre de défaillances. En revanche, les marchés du crédit américains ont affiché une certaine divergence, les écarts de taux des obligations de première qualité continuant à se resserrer, quoique de façon marginale, tandis que les écarts de taux des obligations à haut rendement s’élargissaient légèrement, ce qui suggère un changement d’attitude vers la prudence.

Alors que les rendements nord-américains ont baissé, les rendements souverains européens ont augmenté en raison de l’accroissement du soutien budgétaire et des dépenses d’infrastructure. Le rendement des obligations allemandes à 10 ans a augmenté de 33 points de base pour atteindre 2,70 % à la suite d’annonces de dépenses majeures, avec des mouvements similaires en Italie (hausse de 33 points de base pour atteindre 3,86 %) et en Espagne (hausse de 30 points de base pour atteindre 3,37 %) dans un contexte d’inquiétudes budgétaires croissantes. Cette situation a entraîné une révision générale des prévisions de taux et un regain de volatilité sur les marchés obligataires européens.

Les fonds obligataires ont enregistré des entrées record au cours du trimestre. Selon State Street Advisors, les ETF obligataires ont attiré environ 100 milliards de dollars au cours du trimestre, ce qui les place en excellente position pour surpasser le précédent record de 300 milliards de dollars établi pour l’année 2024. Les investisseurs ont manifestement cherché à se protéger de la volatilité des marchés boursiers et de l’incertitude macro-économique générale.

Dans l’ensemble, le marché obligataire 2025 a été façonné non seulement par les décisions des banques centrales, mais aussi par un discours plus large concernant le réalignement potentiel du commerce mondial, l’expansion fiscale et les pressions de la démondialisation. Alors que les grandes économies continuent de réévaluer leurs stratégies industrielles et commerciales, les marchés à revenu fixe sont devenus de plus en plus sensibles aux développements macroéconomiques et politiques.

Perspectives d’avenir

Le climat économique mondial continuera fort probablement d’évoluer dans la volatilité au second trimestre, voire même au-delà. L’incertitude quant à l’orientation de la croissance et de l’inflation, en raison des risques commerciaux persistants et à une politique imprévisible, continuera certainement à influencer le comportement du marché.

En fin de trimestre, les tensions tarifaires se sont considérablement exacerbées, avec plusieurs séries de mesures mises en œuvre ou encore imminentes, notamment entre les États-Unis, le Canada, le Mexique et la Chine. L’annonce, au début du mois de mars, de l’imposition de droits de douane majeurs par les États-Unis a déclenché une vague de révisions à la baisse des prévisions du PIB et d’ajustements à la hausse des attentes en matière d’inflation. Le Canada, profondément intégré à l’économie américaine et à son appareil de sécurité nationale, est particulièrement vulnérable. Si les droits de douane sont maintenus, les probabilités d’une récession au Canada atteignent un tout autre niveau. Alors que les États-Unis sont, dans une certaine mesure, protégés par la force de leur propre marché intérieur, les premières données sur les nouvelles commandes et l’état d’esprit des consommateurs ont déjà mis en évidence des risques de récession élevés et une volatilité croissante du marché.

Aux États-Unis, la Réserve fédérale reste dans l’expectative, ses futures décisions en matière de taux étant étroitement liées aux données relatives à l’inflation et aux conditions financières générales. Bien que des réductions de taux soient toujours envisagées, il est peu probable que la Fed agisse de manière décisive à moins que la croissance ne ralentisse de manière plus substantielle ou que l’inflation ne diminue de manière durable.

Au Canada, l’incertitude politique plane à l’approche des élections. Les prévisions de croissance ont été fortement revues à la baisse et le ralentissement de l’activité des consommateurs laisse penser que la Banque du Canada maintiendra une position accommodante. Toutefois, l’amélioration de la clarté politique et l’apaisement des tensions commerciales pourraient contribuer

En Europe, la stagflation reste une préoccupation. Les récentes réductions de la BCE reflètent la détérioration des conditions. Les inefficacités structurelles et les limites fiscales, en particulier dans le sud de l’Europe, entravent la reprise. Cela dit, une augmentation coordonnée des dépenses de défense, en particulier de la part de l’Allemagne, pourrait donner un coup de fouet modeste mais significatif à l’économie.

Du point de vue du portefeuille, l’environnement actuel favorise la résilience et la flexibilité. Les titres à revenu fixe de haute qualité sont devenus de plus en plus attrayants, offrant à la fois des rendements compétitifs et une protection contre les baisses dans un régime de croissance ralentie. En ce qui concerne les actions, il reste prudent de mettre l’accent sur les entreprises durables et de grande qualité, dotées de bilans solides et de flux de trésorerie réguliers. Le maintien des liquidités sera également essentiel pour permettre aux investisseurs de réagir rapidement à l’apparition de risques ou d’opportunités.

La diversification régionale et la gestion active des risques seront cruciales car les fondamentaux économiques et les politiques monétaires et commerciales sont en constant mouvement à l’échelle mondiale. La corrélation inverse traditionnelle entre les actions et les titres à revenu fixe s’est, entre autres, réaffirmée, redonnant ses lettres de noblesse aux stratégies de placement équilibrées et diversifiées.

 


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